Le roi des composts

A Panya, pendant le cours du moi de Septembre. Notre groupe et notre belle pile de compost
A Panya, pendant le cours du moi de Septembre. Notre groupe et notre belle pile de compost

 

« Compost is more than just getting rid of food scraps, it is creating the possibility of life. »

Bill Mollison

«  Le compost c’est plus que de se débarrasser des restes de nourriture, c’est donner à la vie une opportunité »

(Ça sonnait mieux que : c’est créer une possibilité de vie ^^)

 

 

Les forêts comme les autres écosystèmes permanents compostent énormément et naturellement. La litière, la première couche sur le sol, est composée de matière organique morte ou vivante, c’est-à-dire de matière synthétisée par des êtres vivants, animaux ou végétaux. Si on creuse un peu, on trouve sous la litière une couche de débris en court de décomposition. Et encore un peu plus profondément on atteint l’humus. L’état final du compost ! Il s’agit du dernier stade de décomposition de la matière organique. C’est cet humus qui, en s’associant avec l’argile issue de la roche mère, créera le complexe argilo-humique : principal composant du sol.

 

Mais tout d’abord, petite introduction… Pourquoi composter ?

Aujourd’hui on nous parle beaucoup de la dégradation des terres, de l’utilisation à outrance d’engrais minéraux, de la pollution de l’air, de la diminution de la qualité des sols et de la biodiversité, de la santé humaine… Il devient donc de plus en plus intéressant de recycler nos déchets organiques de manière intelligente, comme en utilisant le processus de compostage.

Comme vous le savez la permaculture s’inspire de la nature. Le compost sera donc à la base de la permaculture. Il sera notre engrais mais, comme je l’ai dit également dans l’article sur le sol, le compost vous aidera à reconstruire votre sol, améliorer la fertilité du sol et sa qualité, donc augmenter son potentiel en terme de rendement. Mais ce que l’on dit moins c’est qu’un sol en bonne santé donne des plantes en bonne santé. Ca parait bête dit comme ça, et évident. Mais quand on voit comment la plupart des sols sont traités il semble que beaucoup de gens l’ignorent. Et comme cet élément est à la base des écosystèmes terrestres, si ce maillon est faible, le reste s’écroule rapidement.

 

Il existe différentes manière de composter. Le lombricompost, le compostage aérobie, anaérobie (qui produit du méthane que l’on peut utiliser comme biogaz !), le compost à grande ou à petite échelle…

Je vais traiter le sujet du compost rapide qui est aérobie* et se fait à haute température. Je me suis emballée sur le compost et j’ai voulu en dire beaucoup plus, mais je me suis rendue compte que peut-être ça faisait un peu trop.

* système aérobie : donc un système utilisant l’oxygène (les micro-organismes que l’on souhaite utiliser respirent), la pile de compost doit donc être régulièrement retournée pour apporter de l’air.

 

 

Cette façon de composter comporte plusieurs avantages.

Lors du processus, la température monte… monte très haut, jusqu’à 70°C. La plupart des pathogènes et des graines de d’adventices (les mauvaises herbes) seront détruits si une température de 65°C est maintenue pendant 3 jours. De plus c’est un procédé rapide : on peut avoir un compost utilisable en 18 jours, même en France ! Que demander de plus !

 

On désigne souvent le compost comme la pile au fond du jardin où l’on met tous ce qui est biodégradable. Mais le compost, rarement valorisé dans les exploitations agricoles, est très précieux. En fait, le but sera de créer un milieu nutritif pour les microorganismes qui travailleront pour vous 24h/24 et 7j/7. Rien de plus facile que de laisser faire le boulot par quelqu’un d’autre ! Il s’agit donc d’un processus naturel de dégradation ou de décomposition de la matière organique par les micro-organismes. En résultat vous obtiendrez du bel humus. Les bactéries que nous cherchons à avoir dans notre compost vont décomposer la matière organique en trois principaux éléments que les plantes peuvent absorber et utiliser : l’ammonium NH4+, les nitrates NO3-, les sulfates SO42-.

 

Les trois éléments principaux de notre pile de compost (dans tous types de compost) vont être :

-Le carbone (C). C’est l’énergie utilisée par la plupart des organismes vivants pour vivre et grandir. 

-L’oxygène (O). Comme pour nous, l’oxygène est nécessaire à la respiration des décomposeurs.

-L’azote (N). La base des protéines donc également de la croissance et de la multiplication des organismes.

 

Pour un climat tempéré le rapport C/N désiré se situe entre 25 et 30. Cela veut dire qu’on veut 25 à 30 fois plus de carbone que d’azote. On cherchera à avoir dans notre pile de compost : 40% de « brun » riche en carbone, 35% de « vert » riche en azote et minéraux, 25% de « très riche en azote », comme les légumineuses ou le fumier. (Sous les tropiques c’est plutôt 50, 40 et 10%)

 

S’il y a un excès d’azote la pile va sentir fort et mauvais, et l’azote s’échappera sous la forme d’ammoniaque qui est un gaz qui sent particulièrement fort. On perdra donc une grande quantité d’azote qui est précisément l’élément que l’on veut donner aux plantes. Il faut alors ajouter du carbone (des feuilles mortes, de la sciure).

S’il y a un excès de carbone, la pile va se refroidir et les mécanismes vont ralentir car la croissance des micro-organismes va être limitée. Il faut donc ajouter de l’azote. Le plus simple est d’uriner dessus (et oui très forte teneur en azote à cause de l’urée^^), mais on peut aussi ajouter des matériaux riche en N (algues, lisier, fumier…)

 

Physique du compost !

 

Il y a trois équilibres à considérer :

La  taille : La pille doit être assez grande pour retenir la chaleur et l’humidité, et assez petite (surtout par rapport au poids) pour permettre la circulation de l’air et la respiration des microorganismes.

L’humidité : Si la pille est trop mouillée il n’y aura pas d’oxygène et le milieu sera anaérobie, mais les bactéries ont besoin d’eau pour se multiplier.

La taille des particules dans le compost : assez grandes pour permettre une bonne aération, et assez petites pour que la décomposition soit rapide. En gros entre 3 et 5cm. (plus c’est petit, plus rapide sera la décomposition)

 

Bon depuis le début je vous dis que ce compost est très efficace, mais comment vous le prouver… (Essayez chez vous !). Mais vraiment, c’est impressionnant. Au bout de 24 à 48h, si la pile est bien faite et bien aérée, on observe une forte augmentation de la température, au bout de quelques jours il est difficile de manipuler le compost avec ses mains. Et en deux semaines, nous avons fait disparaitre un poulet entier… oui, si vous avez besoin de vous débarrasser d’un corps, le composter peut être une solution. (Pas besoin de tous ces produits chimiques comme dans Breaking Bad !)

 

Comment faire un compost « Berkeley » en 18 jours concrètement?

 

Facile !

Ce type de compost ressemble à une bonne grosse part de lasagne. On alterne les couches de « bruns », haute teneur en carbone (sciure, feuilles mortes, copeaux de bois, bois haché), « verts » (les mauvaises herbes, le gazon, les restes de légumes…), et « riche en azote » (fumier, lisier, légumineuses, urine, algues…).

Chaque couche aura une épaisseur comprise entre 5 et 10cm. Le moins épais étant le mieux. En pensant à respecter le ratio : 40% de « brun » riche en carbone, 35% de « vert » riche en azote et minéraux, 25% de « très riche en azote ».

On mettra les restes de légumes, tous les déchets verts de la cuisine, plutôt au milieu de la pile.

On pourra ajouter des coquilles d’œufs, des minéraux, pour enrichir le compost.

On peut aussi ajouter du compost fini, si vous en avez, cela permettra de démarrer plus rapidement le processus.

En moyenne la pile fait environ 1m3, mais on adapte aussi la taille en fonction de la température extérieure. Étant donné que la température à l’intérieur de la pile peut monter très haut, cela peut être dangereux dans un climat sec et chaud et peut faciliter le démarrage d’incendie. En France, il fait plus froid, on le fera un peu plus grande pour mieux garder la chaleur.

Et le plus important, c’est le retournement. Vous vous en rendrez compte, les matériaux à l’intérieur de la pile se décomposeront rapidement, on cherchera donc à chaque retournement à mettre les matériaux de l’extérieur à l’intérieur et inversement. Le retournement permet aussi d’évacuer un excès de chaleur ou d’humidité, et surtout d’apporter de l’oxygène. Il est recommandé de retourner la pile tous les jours. Mais si on le fait moins souvent, la conséquence sera juste de ralentir le processus et donc le compost mettra plus longtemps à être prêt. On saura qu’on est en fin de processus si la température arrête d’augmenter après les retournements. On rentrera donc dans la phase de maturation du compost ou d’autres organismes thermophiles entreront en action. Cette phase est très importante car c’est à ce moment que se fait la décomposition de la cellulose. Ce sucre complexe qui compose les parois végétales est présent en grande quantité, très résistant et difficilement digestible, il est important de le valoriser et de laisser le temps aux bactéries et champignons de faire leur travail.

A la fin du processus on aura donc une belle quantité d’humus, un pH neutre et voilà !

 

Pourquoi le compost est vraiment cool ?

Je veux dire, en plus d’être la solution à tous les problèmes de sol, de fertiliser gratuitement, de vous permettre de faire grandir de merveilleux légumes et de valoriser vos déchets organiques ?

En améliorant la qualité de votre sol, c’est-à-dire en améliorant ses propriétés physico-chimiques cela permettra au sol :

- D’être plus résistant aux agressions comme la sècheresse, les maladies, la toxicité

- D’aider la culture à mieux prélever les éléments nutritifs

- D’avoir un cycle nutritif de bonne qualité car l’activité microbienne sera vigoureuse.

Globalement en améliorant le sol on réduit tous les risques pour les cultures tout en améliorant le rendement et en réduisant les dépenses en engrais.

Bon, côté praticopratique, on peut le vendre. Faire de l’argent. Si on a de la matière organique à profusion (que faire de toutes les pelures de pommes si on est producteur de jus de pomme à grande échelle ??? Et bien… du compost ?). Et pour les exploitants agricoles, c’est pareil. Si seulement ils arrivaient à s’organiser entre eux, ils auraient des engrais gratos, et naturels.

Autre chose ?

Et bien si vous avez une serre, votre pile de compost peut… la chauffer en hiver ! Et oui mes petits, si votre pile de compost est bien faite, que vous la soignez comme une plante, jamais elle ne sentira mauvais… Et à la fin vous obtenez de l’humus, et l’humus, ça sent la forêt. Bon voilà, et si votre pile est à l’intérieur pendant l’hiver, c’est bien pour elle aussi, car si vous perdez trop de chaleur, le processus sera plus long.

Quoi d’autre ?

Et bien ici, je peux prendre une douche chaude dont l’eau a été chauffée par… le compost. Et oui, imaginez des tuyaux qui passent à travers une pile qui chauffe à 70°C ? Tellement chaud qu’on doit le mélanger à de l’eau froide !

 

 

 

Le compost sauvera le monde !

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Commentaires: 2
  • #1

    Elea (lundi, 11 novembre 2013 10:22)

    Pratique pour se debarasser d'un corps en effet.. ahah! Merci cousine, trés utile toutes ces precisions! Je ne savais que ca chauffait à ce point, cet amas de bestioles, ca donne des idées.
    Amuse toi bien! des bisous

  • #2

    julie (lundi, 11 novembre 2013 12:13)

    Hey, très intéressant ton article sur le composte je pensais vraiment pas que ça chauffait autant....

    Et j'adore regarder tes photos :-).

    Bisous Mme la mangeuse de criquet ^^

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